Abstract / Résumé
Nous nous sommes proposées d’étudier dans cet article le motif biographique du violon d’Ingres chez le peintre roumain postimpressionniste Stefan Dimitrescu (1886-1933). Après avoir rapelé l’origine et la signification de cette synecdoque, passée dans le langage courant à la fois en français et en roumain, nous avons proposé une synthèse des caractéristiques de ce motif, plutôt récurrent dans l’histoire de l’art, à partir de la biographie d’Ingres investie d’une valeur paradigmatique. Loin d’être une simple anecdote, cet élément biographique a eu des incidences profondes sur la carrière et l’oeuvre du peintre-violoncelliste. Nous nous sommes attachées à faire toute la lumière sur ses études musicales grâce à l’étude des archives du Conservatoire de Jassy, source précieuse restée inédite à ce jour, que nous avons complétée par les témoignages des contemporains et les quelques écrits autographes connus. Nous avons ainsi découvert que Dimitrescu a étudié le violoncelle avec August Moldrich de 1903 à 1907, avant de se voir contraint d’abandonner ses études pour pouvoir subvenir à ses besoins et mieux se consacrer à la peinture. Elève extrêmement discipliné, il a dû acquérir une technique suffisamment bonne pour faire partie de l’orchestre du Conservatoire et continuer à donner des concerts sa vie durant. Avantgardiste en musique autant qu’en peinture, il semble avoir eu un goût particulier pour les primitifs. Son habileté musicale autant que son talent plastique l’ont propulsé au poste de directeur de l’Ecole des Beaux-Arts de Jassy durant les dernières années de sa vie. Son amour de la musique se reflète dans deux oeuvres de l’époque parisienne, Chez Otetelesanu et Cabaret, dont nous sommes les premiers à avoir proposé une lecture cohérente en relevant l’importance de l’iconographie musicale dans la signification de ces tableaux.